lundi 27 juin 2016

Le ciné-club de Potzina: The Faculty

Je tiens d'abord à m'excuser auprès de notre chère Potzina (allez voir son blog, vraiment!) pour avoir loupé tout plein de Ciné-club super tops, la faute à une organisation de la loose sur mon blog ces dernières semaines. In extremis, j'essaie de placer une mini-chronique sur le sujet de ce mois-ci qui est alléchant comme un banana split en bord de mer et qui m'a fait hésiter sur un nombre certain de très chouettes films: "Les aliens sont parmi nous"'.

Vous comprendrez que je me suis soudain sentie comme Valérie Damidot devant le nuancier 2016 de Dulux Valentine. J'étais parti sur du dur de dur, du Carpenter (entre nous, de The Thing au Village des damnés en passant par Invasion Los Angeles, y'avait le choix). Et puis je me suis dit que Carpenter était à la mode en ce moment, et qu'il n'avait pas trop besoin de moi. Je me suis alors tournée vers les comédies comme Paul ou Voisins du troisième type, et puis je me suis dit que j'avais chroniqué pas mal de grosses comédies ces derniers temps. Et puis, je me suis dit que c'était le bon moment pour revoir et peut-être réévaluer un film que j'avais vu à sa sortie il y a bien longtemps, à l'époque où j'étais dans une période chieuse snobinarde du genre "si tu passes pas à Cannes ou que t'es pas indépendant, tu m'intéresses même pas!". Un film que j'avais donc vu du bout des yeux alors, pleine de mon dédain crasse d'étudiante prout-prout, et qui méritait bien une deuxième chance à la lumière de ces quelques années de profond mûrissement, de réflexion et de sagesse. Bref, j'ai décidé de revoir The Faculty, de Robert Rodriguez, et c'était une sacrée bonne idée!


Le pitch, en gros, est le suivant: Les profs du Lycée sont des extra-terrestres! Ça commence comme ça: une entité extraterrestre prend peu à peu possession des corps de la population entière d'un lycée en commençant par le personnel enseignant. Mais c'est sans compter sur une équipe d'ados très différents mais tous pleins de ressources...

Franchement, mais que n'ai-je su apprécier à sa juste valeur ce très chouette film? D'abord, ne serait-ce que pour son casting de fous: Josh Harnett en glandeur de génie, Elijah Wood en adorable nerd, la trop rare Clea Duvall en rebelle outcast (what else?), Famke Janssen en prof coincée, Salma Hayek en infirmière sexy, Usher, Laura Harris...  Franchement, ce cast réunit tout ce qu'il y avait de plus fresh et séduisant à la fin des années 90, ça sent bon le crop top et le nombril percé, No Doubt et Sugar Ray, le CK1 et le 501.


Ensuite, parce que j'avais largement sous-estimé l'humour et la portée du film. J'étais restée sur l'idée que c'était un énième film idiot sur des ados, avec un peu de fantastique et d'horreur dedans pour faire vendre du pop-corn. Grossière erreur! Croire cela, c'est croire que Buffy n'est que l'histoire d'une cheerleader qui tue des vampires, c'est croire que Code Quantum n'est que l'histoire d'un mec qui se retrouve coincé à faire des sauts dans le temps, c'est croire que X files n'est que l'histoire de deux agents du FBI qui traitent des affaires que personne d'autre ne veut (Merci M6, d'ailleurs, pendant que j'y suis).

Nan, The Faculty va bien au delà de ça. D'abord parce qu'il ne se prend pas trop au sérieux. N'oublions pas que c'est Roberto Rodriguez qui est derrière les manettes, rarement connu pour sa gravité et que c'est Kevin Williamson, qui avait réussi le tour de force de faire revenir l'horreur et le rire ensemble avec Scream. Il ne faut donc pas oublier que The Faculty est clairement une comédie et tout comme Scream avait été une sorte de détournement du film d'horreur, the Faculty est aussi un détournement et pas des moindres: celui des teen-movie. Clairement, The Faculty, c'est le Breakfast club rencontre le troisième type. Tous les personnages sont là: le sportif, la prom queen, le bad boy, le nerd, la fille zarb. Sauf qu'au lieu d'être réunis par une heure de colle et la révolte contre le monde des adultes qui ne les comprend pas, ceux-là se réunissent pas la force des choses et pour combattre l'envahisseur de l'espace. On joue avec les clichés du teen-movie sans vergogne, et c'est drôle et assez jouissif, notamment quand ça devient borderline (la drogue pour lutter contre les extraterrestres, la sexualité réprimée...)




Et puis c'est finalement pas si bête que ça. Et ça, je l'ai découvert l'an dernier avec le film de Charlie Lyne, Beyond Clueless, une excellente analyse des teen-movie, qui montre en quoi ce film est une "métaphore de l'expérience adolescente" très efficace. En effet, les thèmes de l'individu et du groupe sont très bien posés, à la fois par la dynamique de l'univers lycéen, avec ses différentes cliques plus ou moins populaires, mais aussi par l'invasion extra-terrestre qui travaille notamment beaucoup sur l'intégration à un grand tout, l'absorption de l'individu. Vraiment, je vous conseille à nouveau ce docu en marge de The Faculty: c'est brillant, et ça donne envie de revoir plein de teen-movie.

Enfin, en dehors du fait que ce soit plus fun et moins bête que ça en ait l'air, c'est quand même sacrément foutu. C'est rythmé, plutôt bien interprété, c'est justement équilibré entre comédie et fantastique, et j'ai été particulièrement impressionnée rétrospectivement par les effets spéciaux, notamment ceux de la créature dans l'eau: on a du mal à croire qu'ils datent de 1998.


Bref, si vous aussi vous avez fait la moue devant The Faculty il y  a 17 ans, parce que c'était pour les gamins, donnez lui une seconde chance: on ne savoure jamais mieux les films pour les gamins que lorsque l'on en est plus un!


dimanche 26 juin 2016

Qui a tué le chat? Un film noir bubblegum



Grâce à Cinetrafic, j'ai une nouvelle fois eu la chance de découvrir une comédie de Gillian Greene, Qui a tué le chat? (à ne pas confondre avec le même titre de 1973, de Comencini), sorti le 27 mai 2016 en DVD par Metropolitan Filmexport.

Pour vous dire la vérité, après avoir vu la bande annonce de ce film, je m'attendais à une petite comédie américaine légère, à regarder un jour de fatigue. Et oui, moi, le soir quand je suis fatiguée et que j'ai du mal à suivre, je ne supporte que deux choses: les comédies, petites ou grosses, qui détendent les neurones et les zygomatiques, et les films d'action ou d'horreur pas trop complexes qui s'adresse plus à mes instincts primaires (voire primates) qu'à mon intellect d'homo sapiens sapiens un peu trop éprouvé. On a parfois tendance à l'oublier, surtout en ces périodes post-cannoises, mais le cinéma, ce n'est pas qu'un questionnement philosophique sur la vie, ce n'est pas que la folie des passions et une pensée mise en images. Parfois, le cinéma, c'est juste raconter une histoire pour le plaisir des spectateurs, et c'est aussi tout à fait louable. Et bien, avec Qui a tué le chat, j'ai eu cela, et même un peu plus.




Tout commence le jour où Clinton, jeune slacker en robe de chambre habitant chez sa maman (à qui on souhaite bien du courage), découvre avec horreur le cadavre de son chat (qui n'est autre que son meilleur ami) sur le macadam de sa banlieue résidentielle, le corps traversé d'une flèche. Envers et contre tous, il va mener l'enquête dans sa petite ville pour retrouver le vil assassin du félin, ce qui va l'entrainer dans une véritable aventure de roman noir, avec femme fatale, truands de supermarché et complots pavillonaires.

Alors voilà, cette petite comédie indépendante n'a d'autres prétention que celle à faire rire et à jouer du clin d'œil, mais je vais vous dire un truc: ça fonctionne plutôt pas mal. D'abord parce que le scénario est assez resserré sur une petite ville tranquille, ce qui permet à la fois de donner un cadre restreint à cette histoire tout en lui permettant beaucoup de fantaisie sur les personnages et les situations. C'est donc un film assez farfelu, assez léger, qui ne jouit pas d'un virtuosité de malade en terme de réalisation, mais reste tout à fait honnête et parvient à délivrer de façon agréable l'histoire rocambolesque de Clinton. Bref, ça pète pas plus haut que son pied de caméra, et ça fait le job avec sincérité et professionnalisme, moi ça me va tout à fait.


Le petit plus, c'est quand même le casting, parce que franchement, y'a rien à redire là-dessus. Dans le rôle principal de l'éternel ado en robe de chambre moins cool que le dude, le trop rare mais toujours délicieux Fran Kranz, que vous connaissez peut-être si comme moi vous êtes fan des séries de Joss Whedon et surtout de Dollhouse (il y interprète le génial Topher). Il est absolument parfait dans ce mélange de naïveté et de pédanterie, et parvient à être aussi attachant qu'insupportable. On retrouve aussi Greg Kinnear en patron de supermarché à moustache, qui comme d'habitude, assure en comédie, et J. K. Simmons, que ça fait sacrément du bien de ne pas voir traumatiser des musiciens et des spectateurs. Dans le rôle de la femme fatale Nikki Reed, une comédienne que je ne connaissais pas et qui assure bien le job de la belle nana qui fait tourner les têtes mais parvient à rester sympathique. Et surtout, dans le rôle du rival, une petite révélation, Leonardo Nam, qui est simplement parfait en miroir déformant du héros, et est aussi drôle que flippant, tout en dégageant un sex appeal assez indéniable.




Et puis il faut dire un truc: je me suis quand même beaucoup amusée. Parce que c'est un film très amusant. Il a cette originalité d'être construit comme un film noir (avec l'antihéros plongé dans une affaire qu'il n'a pas demandée, le complot auquel personne ne veut croire, le gang où le méchant n'est pas forcément celui que l'on croit, la femme fatale...) dans un décor tout pimpant (un peu comme Edward aux mains d'argent introduisait un film de la Hammer dans un décor de sitcom) et possède une loufoquerie très agréable. On apprécie les personnages, on rit un peu, et on passe plutôt un bon moment. Alors non, ce n'est pas un immense film, mais ça reste un film tout à fait honorable et séduisant.


Le DVD:

Je n'ai reçu qu'une copie de distribution, qui en correspond donc peut-être pas au DVD vendu actuellement. L'image et le son sont en tout cas de bonne qualité. Mais les bonus sont réduits au minimum, soit une bande-annonce du film, ce qui reste très léger.

Si vous voulez étendre votre choix de films entre comédie et sarcasmes ou découvrir d'autres films à voir qui valent le détour, n'hésitez pas à vous rendre sur Cinetrafic.

vendredi 24 juin 2016

The boy: flippantin!



 Grâce à Cinetrafic, j'ai découvert un film d'horreur pas piqué des vers et qui envoie du petit bois: The Boy, une sorte de version flippante de Pinocchio, où l'on n'a pas du tout envie de jouer les fées bleues.

C'était une très jolie petite surprise. J'adore les films d'horreur qui jouent en premier lieu sur l'ambiance creepy, en particulier si cette ambiance a quelque chose d'assez suranné, qui rappelle les bons vieux films des années 60, la Hammer et les meilleurs épisodes de la quatrième dimension. Pour moi, un bon petit film d'horreur n'a ni besoin d'un gros budget, ni de tonnes d'hémoglobines, ni de faire sursauter toutes les 3 minutes à grands coups d'apparitions soudaines et de grincements de cordes. Un bon film d'horreur, ça peut être tout simplement un truc bien étrange, une histoire qui fait froid dans le dos, des choses qui ne sont ni ce qu'elles devraient être, ni à la place où elles le devraient, ce sont des voix confuses et des hallucinations qui jouent avec notre mémoire: la matière même des cauchemars. La peur ce n'est pas forcément la surprise, ça peut être aussi une sensation pernicieuse qui se distille petit à petit, comme dans les bons vieux classiques littéraires du genre, de Dracula au Tour d'écrou, de Mary Shelley à Lovecraft. Et c'est sur ce tableau qu'a intelligemment décidé de jouer The Boy.



The Boy, c'est donc avant tout l'histoire d'une jeune femme (bah oui!), Greta. Elle arrive en Angleterre pour être recrutée comme gouvernante chez les Hillshire, dans un manoir bien excentré et à la déco bien désuette. Les Hillshire ont l'air bien fatigué par leur fils Brahms, qui d'après leur dire est pour le moins turbulent. Sauf que les Hillshire sont un couple pour le moins vieillissant et que Brahms se trouve être... un pantin. Partagée entre l'envie de rire, l'inquiétude et le besoin de rester isolée (on apprendra rapidement que Greta fuit un stalker aux Etats-Unis), elle accepte finalement de s'occuper du bambin de bois pour laisser aux Hillshire le loisir de prendre quelques vacances...

Voilà. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi, rien qu'avec ce pitch, je sens le truc étrange et bien glauque pointer son nez. Le reste du scénario est dans l'ensemble dans la même veine, et la tension est bien tenue: l'horreur s'insinue peu à peu, transpirant à travers les fissures des murs du manoir, la sensation de malaise s'alourdit et on bascule progressivement dans une situation de plus en plus bizarre, de plus en plus malsaine. Personnellement, j'ai beaucoup aimé cette atmosphère de plus en plus pesante dans le récit, cette façon de passer d'une situation de base un peu creepy mais assez rigolote à une dimension beaucoup plus perturbante, mais en douceur, en la laissant s'insinuer en nous sans a-coup qui font crier, mais qui nous maintiennent dans une inquiétude et une étrangeté déstabilisante. J'ai simplement regretté une partie de la fin qui entre un peu trop dans l'action à mon goût, et le traitement d'un personnage (le love interest de Greta) qui aurait pu être à mon avis beaucoup plus nuancé.



D'autant plus que cette ambiance est soulignée par un travail visuel que j'ai trouvé très réussi. On sent que le budget du film pète pas le plafond ou la garde-robe de Macron, mais il y a un travail assez malin pour que ça donne bien le change: un cast réduit, un huis-clos intérieur qui permet de travailler sur une jolie lumière glauque (dans le sens chromatique comme dans le sens figuré), un choix qui se porte plus sur l'atmosphère et un certain classicisme que les effets spéciaux. Ce qui rend pour moi le film tout à fait honnête et honorable. J'apprécie beaucoup la photographie qui sait rendre le manoir poussiéreux et la morne lumière de la campagne britannique. Très joli travail aussi de décor et d'accessoire, notamment pour le fameux pantin dont j'aime beaucoup le design un peu désuet, et dont l'expression fonctionne pour tout, et aussi une affreuse croute qu'on voit dès le début du film, et qui participe de ce malaise créé entre l'envie de rire et la bizarrerie.


En ce qui concerne l'interprétation, rien de délirant mais rien de déshonorant non plus. Lauren Cohan, dans le rôle principal, ne réalise pas une performance incroyable, mais cela reste correct, même quand le rôle devient un peu plus complexe. Ce n'est pas le point fort du film, mais rien de bien grave.

Dans l'ensemble, je trouve que The Boy, sans être un film révolutionnaire, est un malin petit film, efficace et très atmosphérique, qui sait jouer de ses contraintes au mieux pour obtenir un résultat esthétique et disons-le, assez angoissant, ce qui dans ce genre se traduit plutôt par une réussite.

En ce qui concerne le blu ray, édité par Metropolitan Filmexport et sorti le 27 mai 2016, je ne peux juger que sur la copie de distribution que j'ai reçue: la qualité de l'image et du son sont corrects, il y a une version en audiodescription ce qui est toujours une bonne nouvelle. En revanche, on peut déplorer l'absence de bonus, si ce n'est la bande annonce du film. Pour moi, c'est le petit bémol.

Pour plus d'idées films sur l'horreur et le fantastique, rendez-vous sur Cinétrafic:
http://www.cinetrafic.fr/film-d-horreur
http://www.cinetrafic.fr/meilleur-film-fantastique-2016

lundi 6 juin 2016

Sisters: 40 ans, toujours plus sottes

C'est mon anniversaire. Je suis contente parce que je vais avoir des cadeaux, mais en même temps, je sais que je passe la barrière où définitivement, je suis plus proche de la quarantaine que de la trentaine. Bien évidemment, ça ne se voit ni sur mon visage effrontément juvénile ni dans mes choix cinématographiques, toujours dignes de l'ado un peu geek que j'ai toujours été. Mais quand même, je vois le monde changer autour de moi et il faut bien que je m'y adapte. Dans l'ensemble, je m'y fais plutôt, mais il y a une chose de mes jeunes années vingtenaires que je regrette parfois amèrement. Je me souviens d'un temps où tout était possible: tu sortais le mercredi soir, tu dansais, tu buvais, tu faisais de la musique jusqu'à très tard dans la nuit, tu rentrais aviné et en sueur, même au mois de décembre, et quand tu te relevais le lendemain, tu te mettais un coup de pied au derrière pour aller bosser ou étudier, et tout se passait bien. Mais ça c'était avant. Avant que sortir la semaine après 22h ne devienne trop difficile, avant que tu découvres la gueule de bois (la vraie, tu sais, pas juste celle qui te donne légèrement la gerbe au réveil, non, celle qui te donne une telle migraine que t'arrive pas à décoller tes paupières, qui font que tu regrettes d'avoir bu la veille, d'avoir bu ta première bière, d'être née, qui te zombifie complètement pendant 48 h, incapable de faire autre chose que des pâtes et du visionnage assidu de films et de séries pas trop compliqués, celle qui prend une semaine à s'estomper). C'était avant que tu arrêtes de sortir l'hiver parce qu'il fait trop froid, ou dans certains endroits parce qu'il y a trop de monde et que c'est plus rapide de prendre une bière dans frigo que d'essayer de rentrer dans le champ de vision d'un barman surbooké. Et surtout, c'était avant que tes potes se mettent à avoir des enfants et une carrière. Avant que les soirées de gueudins du samedi soir se finissent en petites repas "à la bonne franquette" en mode masterchef, qu'au lieu de gueuler "j'adore cette chanson" toutes les trois minutes pour te lever et buttshaker et headbanger, tu ne te mettes à t'exclamer "j'adore le basilic" toutes les trois minutes pour te pencher et reprendre du houmous sur la table du salon, qu'au lieu de se mettre en cercle pour monter un énième projet de scénario ahurissant en se faisant passer une cigarette qui fait rire, on ne se mette autour d'une table pour disserter des méthodes d'apprentissage de la lecture et des marchés bio en se faisant passer la théière de tisane. Pourtant, parfois, je me prends encore à rêver d'une folle nuit où on pourrait tous à nouveau faire n'importe quoi, sans peur du lendemain et des OGM, où on pourrait mettre du Outkast à fond et danser comme des bêtes, où on oublierait d'être adultes, responsables et intelligents et où on rugirait à nouveau "F...k you I won't do what you tell me" en secouant notre chevelure, même dégarnie. Et parfois, il arrive qu'à la  faveur de la pleine lune ou d'une occasion particulièrement festive, les rêves se transforment en réalité.



Ce rêve formidable de lumières, de sueur et de biture, je ne suis pas la seule à le faire. C'est aussi le cas des deux personnages de la comédie Sisters, de Jason Moore, où 2 frangines que tout oppose (Tina Fey et Amy Poelher) apprennent que leurs parents vendent la maison où elles ont passé leur adolescence. Elles décident donc, à la veille de cette vente, d'organiser une dernière grosse fête avec leurs copains du lycée pour se remémorer le bon vieux temps et dire au revoir à leurs souvenirs de jeunesse.

Disons-le tout de suite: Sisters ne plaira pas à tout le monde (je vous invite d'ailleurs à lire ici pour vous faire une autre opinion). Et c'est vrai qu'il est loin d'être parfait:le scénario tient sur une antisèche, il va parfois très loin dans le pipi-caca-prout et au vu des deux excellentes comédiennes qui tiennent le film, il reste quand même mineur.



Mais vous savez quoi? Et bien j'ai tout de même passé un excellent moment avec ces deux frangines.D'abord parce que bon, même si le scénario est aussi mince qu'une instagrammeuse, il tient carrément la route: tout y est: l'exposition des personnages, leurs intentions, le conflit, la fausse victoire, le retournement du milieu, la catastrophe et la résolution. Ok, c'est super bateau comme structure (c'est même la structure de base à la Save the cat), mais ça fonctionne, donc je ne m'en plaindrais pas, même si j'avoue que la fin est un peut trop longue à mon goût.

Et puis bon, y'a surtout Tina Fey et Amy Poelher dont je suis assez fan. Elles avaient déjà
 fait ensemble le film Baby Mama qui était un peu daubasse parce la construction du film était très bancale et qu' elles hésitaient toujours avant de plonger dans la bonne grosse comédie. Pas de ça ici. Rien de très inventif non plus, puisque les rôles des deux comédiennes sont assez caricaturaux, mais elle en font quelque chose d'intéressant. D'un côté, Tina Fey joue les quarantenaires instables, toujours en galère et mère un peu indigne. De l'autre, Amy Poelher joue la gentille fille toujours prête à s'occuper de tout le monde qui, le temps d'une soirée, veut pouvoir enfin lâcher prise. Et elle est absolument délicieuse. Amy Poelher sait toujours parfaitement jouer de sa maladresse et créer des personnages très attachants. Elle arrive à créer ce truc où quand on la voit, on a envie de rire et de dire "oooh!" en penchant la tête sur le côté, comme devant un enfant qui fait un lapsus lors de sa première récitation.



Ensuite, oui, ça va très loin dans l'humour gras. Et ben avec moi, l'humour gras, ça fonctionne bien, surtout quand il est accompagné de cette adorable maladresse polhesque. Faut dire que je suis le bon public pour ça: je fais partie de ces gens qui ont du mal à refréner un rire quand j'entends "caca-boudin", et qui adorent Will Ferrell. Sisters ferait d'ailleurs penser à un pendant féminin de Frangins malgré eux, qui est un de mes films préférés. Tous les deux parlent finalement d'un sujet assez similaire: une génération de trentenaires-quarantenaires incapables d'avoir la même vie que leur parents au même âge, leur insécurité ou financière ou affective, leur difficulté à imaginer un avenir à l'âge où leurs parents avaient le leur tout tracé. Parce que sous des dehors rigolards, Sisters parlent quand même d'une mère célibataire qui a du mal à garder un job et un toit et d'une femme qui se dévoue totalement aux autres et à son métier pour oublier sa solitude. Alors je sais que pour certains, l'humour un peu grossier  ne passera pas, notamment une scène très graphique, douloureuse et d'une longueur volontairement excessive qui personnellement m'a beaucoup fait rire (avec ce petit soupçon de honte, quand même, qui fait toujours du bien). Je pense aussi que ce que  certaines personnes peuvent accepter d'hommes comme Will Ferrell ou Mike Myers, l'acceptent parfois moins de femmes, d'autant plus quarantenaires, qui auraient donc une sorte de devoir de dignité lié à leur sexe et à leur âge. Moi, ça me passe bien au-dessus et je leur sais gré de pousser le bouchon au-delà du raisonnable et de la bienséance, ça me rassure et me donne envie de fêter mon anniversaire sans peur du ridicule, l'accueillant les bras flétris et ouverts.

Je dois ajouter aussi que le cast comporte quelques bonnes surprises: Diane Wiest en maman, John Leguizamo en ancien bad boy devenu gros beauf (mais caliente quand même, on parle de Leguizamo!), John Cena en dealer imperturbable, et surtout Maya Rudolph, comédienne qui joue souvent les seconds rôles et que j'apprécie beaucoup, qui joue ici la successful working mom qui rêve de prendre une revanche sur son éviction sociale de ses jeunes années, et qui est sûrement le personnage qui m'a fait le plus rire.



Et puis oui, j'avoue que ce film m'a quelque part un peu touchée, parce que oui, cette envie de tout envoyer balader et pour une soirée, faire comme si on avait 17 ans (et Rimbaud avait raison, on est pas sérieux quand on a 17 ans), je la comprends. Cette idée insupportable de ne pouvoir jamais connaître la vie de quarantenaires modèles qu'ont connu nos parents avec maison et jardin, enfant, travail et sécurité, ma génération et moi, on la connaît et que l'on rêve de revenir à l'époque où l'on croyait cet avenir assuré et qu'on pouvait tranquillement profiter de la vie en l'attendant, et ben je peux le comprendre.

Alors vous savez quoi? Je mets ma combinaison, je mets les bacs à glaçons et la menthe au congélo, et ce soir, on va fêter mes balais en les enlevant de là où je pense!