Grâce au très chouette blog Baz'art, qui organise régulièrement des concours, j'ai été tirée au sort pour recevoir le blu-ray du film Green Inferno, d'Eli Roth, un film qui s'inspire largement de nombreux films italiens très versés sur le cannibalisme, le gore et les filles en petite tenue. (Merci Filou!)
J'étais très contente de le recevoir, et ce pour plusieurs raisons. D'abord, j'en avais plutôt lu et entendu du bien, et comme je ne suis jamais contre un peu d'hémoglobine à l'écran, j'avais envie de vérifier la goritude du projet. Mais surtout, le sujet me séduisait beaucoup: balancer une bande d'étudiants pétés de thunes, activistes et moralisateurs au fin fond de l'Amazonie et les livrer à une tribu cannibale, ça relevait presque du fantasme pour moi en ce moment. Parce que si toi aussi, t'en as marre des donneurs de leçons "hollier than you" qui te pourrissent la vie en voulant te culpabiliser à mort sur ton implication dans le bien-être des autres et de la planète qui ne sera jamais, mais alors pas même d'un chouya, égalable à leur action sainte et bienfaisante, avoue-le, les imaginer rissoler au fin fond "du magnifique poumon de la terre" qu'ils ont en poster par Yann Artus Bertrand dans leur chambre, ça te procure un plaisir incommensurable quand ils sont en train d'énumérer toutes les raisons de te comparer à Hitler pour avoir ramené un kebab-coca-frites dans un sac plastique....
Bref, tout ça me donnait pas mal envie de voir ce film, je n'avais qu'une appréhension, mais pas des moindre: Eli Roth. De lui, je n'avais vu qu'Hostel, mais j'avais trouvé ce film assez minablement raccoleur, autant dans le sujet que dans le traitement sang pour sang-gore pour gore, qui ne savait pas trop se positionner entre horreur, comédie noire, Grand-Guignol, et qui pour moi manquait salement de point de vue. Mais bon, je me disais qu'il méritait quand même une autre chance, et que ce n'était pas très fair-play de le juger sur un seul film.
J'ai donc vu ce film hier, avec mes apriori et mes envies, et dans l'ensemble, sur les deux, je ne me suis pas trop trompée.
En effet, s'il y a une chose que j'ai apprécié, c'est bien l'aspect "comédie noire" du scénario, l'ironie de l'histoire elle-même. Faire plonger de jeunes activistes imbus d'eux-mêmes au possible, venus assurer la défense de la forêt amazonienne et des tribus qui y vivent comme de preux chevaliers des temps modernes dans l'enfer de ce qu'il sont justement venus protéger est une assez bonne idée, d'autant plus que les personnages sont sacrément gratinés. Ces chevaliers blancs bien bourgeois qui décident de partir sauver la forêt amazonienne avec leurs téléphones portables et leur néocolonialisme rance (les jugements sur la population locale vont bon train), sans s'inquiéter de la manière dont cette opération est financée, on a quand même bien envie de les voir souffrir... Et la manière dont les bons sentiments de ces moralisateurs vont vite tourner au vinaigre dès l'arrivée de problèmes est assez rafraichissante. Pour moi, c'est le gros point positive de ce film: une satire grand-guignolesque du charity business, n'hésitant pas à mettre un gros coup de pied dans la fourmilière du moralisme.
Ceci étant dit, le scénario n'est pas, mais alors vraiment pas d'une originalité folle. D'abord à cause des personnages, qui ne sont qu'une galerie de clichés. A commencer par l'insupportable héroïne qui est la parfaite oie blanche-fille à papa-tête à claque, qui fait quand même tout pour qu'on ait envie qu'elle ramasse grave 1. Elle a un poster de 37.2 le matin 2. Sa motivation pour entrer dans l'activisme, c'est les beaux yeux d'un bellâtre idiot 3. La seule manière dont elle puisse supporter son père qui décidément s'inquiète beaucoup trop pour elle (rendez-vous compte, il lui demande où et avec qui elle part à l'étranger), c'est si sa bff l'accompagne. Bref, on est presque déçue qu'elle ne souffre pas plus. Les autres personnages sont encore plus caricaturaux: le beau gosse soit-disant charismatique qui se la joue Che Guevara en Ralph Lauren et qui, on s'en doute dès le premier plan où il apparaît, se révèlera être une pourriture, sa copine jalouse, blonde et prête à tout, la lesbienne tatouée et courageuse, la jolie blonde un peu niaise, le rigolo roux de service qui défend les plantes, surtout quand elles se fument, le mec gentil, noir et rondouillard, ce qui en fait la parfaite première victime, le geek intello qui parvient à garder son sang-froid et ses neurones en toutes situations...
Mais dans leur malheur, ces super clichés ont beaucoup de chance: ils sont tombés sur la tribu la plus teubé de la terre. Je ne parlerai pas de la chamane, qui a autant l'air d'appartenir à une tribu d'indiens que Balladur aux usagers du métro, qui a vu dans le script la possibilité d'enfin exploiter ses talents de tragédienne et qui en fait des caisses. Mais vraiment, comme tribu de sanguinaires cannibales, on est vraiment face à des manches:
1. Ils ont le choix entre bouffer des filles gringalettes, un petit mec tout freluquet et un mec bien baraque pour casser la graine. Ils choisissent...ben pas le mec baraque, donc plein de muscles, donc plein de viande. Franchement, t'as la dalle: tu as devant toi deux tic-tacs, une demi-pomme et une tartiflette et tu choisis pas la tartiflette??? Oui mais bon, tu comprends, le mec à biscottos, on en avait besoin pour l'histoire, alors...
2. Un petit sachet de beuh fait tripper une tribu entière, à tel point qu'ils en deviennent hilares et aveugles (oui, la drogue c'est pas bien, ça rend aveugle) et sont incapables de voir la bouffe se carapater.
3. Attention, moment poésie: ces cannibales n'ont aucun respect de leur produit. Ils démembrent avant de couper la tête, il ne vident pas l'abdomen, ils brisent les os, franchement, y'en a pas un qui peut passer son CAP boucherie! D'autant qu'ils font manger du gras à leurs futures victimes au lieu de leur donner du maïs qu'ils ont à foison, ils ont carrément perdu leur label bio!
4. Ce sont les pires geôliers de la planète puisqu'on peut quand même comptabiliser 4 évasions sur 6 captifs, avec une surveillance constante sur une cage en plein air de pratiquement toute une tribu! Heureusement que leurs dons en sarbacane surpassent leur intelligence, parce la tribu serait morte de faim depuis longtemps, et aurait pas attendu que des bulldozers viennent menacer leur habitat!
Et puis, en dehors de ce scénario écrit en dépit du bon sang (et encore, je vous épargne la fin), il y a un sacré paquet de trucs qui servent à rien dans ce film. En vrac:
- La saturation du vert: sérieusement, on est dans la forêt amazonienne. C'est déjà un peu le max. Pas besoin d'en rajouter avec une couleur qui vire au fluo, et des tenues de chantier jaunes, fluos elles aussi.
- Le pipi caca prout: autant dans une comédie, ça peut me faire marrer. Mais quand tu vois que les personnages sont plus dégoûtés par une personne qui doit se soulager dans une cage que par leur copain qui cuit à côté, tu te demande si l'auteur du scénar n'a pas 14 ans.
- On se pose la même question dès que l'on touche au sexe.
- Et puis surtout, ça se veut provoquant, mais ça cherche surtout à plaire aux ados mal vieillis. Alors, oui, ça se réclame du film italien d'exploitation cannibale, ça va même jusqu'à nous faire un petit cours sur le sujet en fin de générique, mais on en reste quand même loin, notamment à cause du traitement très adolescent du film. C'est dommage, sur un sujet aussi réjouissant, ça aurait mérité d'avoir carrément plus de mordant.
Hahaha ! Ton article m'a fait mourir de rire :D C'est brillant !
RépondreSupprimerJe ne suis pas sûre d'avoir envie de le voir. On ne peut pas dire que je sois fan des cannibales et si en plus ils ne vident pas la bouffe avant de passer à table, je pense que je vais les éviter ;)
Merci. J'avoue que parmi les différents genre de film d'horreur, le film de cannibale n'est pas vraiment celui que je préfère. Par exemple, je ne suis pas fan de Cannibal Holocaust, qui est un peu le modèle de ce film, qui est lui-même bien en-dessous de sa référence. Donc, c'est pas grave si tu ne le vois pas, parce qu'en dehors du fait assez réjouissant de voir des personnages imbuvables souffrir, je trouve que ça reste quand même écrit avec les pieds et franchement gamin par moment.
SupprimerEt puis bon, dans le genre trip dans la forêt amazonienne, va falloir faire fort pour égaler la terreur que j'ai eu la première fois que j'ai vu Aguirre, la colère de Dieu
Le coca dans le sac plastique c'était du rouge, du light, du zéro ou du life? Non parce que, ça change tout.
RépondreSupprimerCe genre de films n'est pas du tout ma came(bouh!Creepy!). Cependant,comme toujours, tu en parles si bien, ton analyse semble si pertinente(Et en plus tu me fais rire) que j'oublie un instant que ce n'est pas pas came.
C'est de la sorcellerie ça Madame! Ni plus, ni moins.
^^
Je tiens d'abord à dire que je pèse plus lourd qu'un canard: on ne pourra donc pas m'envoyer au bûcher!
SupprimerMais quand même, merci beaucoup, je suis toute cramoisie.
Sinon, autant choisir le coca rouge, ça énerve aussi les pourfendeurs du sucre, héroïne des temps modernes (Quels petits joueurs, dans trainspotting, s'ils avaient pu me voir avec une boîte d'haribo!
https://www.youtube.com/watch?v=yp_l5ntikaU
SupprimerHi hi, trop bien! enfin un film qui sort de l'ordinaire...
RépondreSupprimerLe sujet, oui, mais sur le traitement et les personnages, j'ai quand même vu beaucoup plus original...
SupprimerTa chronique m'a fait mourir de rire !!! :D :D
RépondreSupprimerLe fond a l'air intéressant, en tout cas sa critique, mais j'avoue que j'ai peur de le regarder, peur d'être écoeurée...
Merci :-)
SupprimerAu niveau écoeurement, y'a du level, même si ça reste grand-guignolesque et qu'on n'y croit pas non plus intensément. Après, même si ça reste assez amusant, c'est tout sauf un film indispensable.