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lundi 25 janvier 2016

You can't take the sky from me Ciné-club de Potzina: Perdu dans l'espace

J'avoue, j'étais très très à la bourre pour le Ciné-club de Potzina, qui a pourtant ce mois-ci un thème passionnant: "Perdu dans l'espace". En retard au point où j'avais envie de vous resservir un de mes tous premiers articles, sur un de mes films et livres préférés, qui est on ne peut plus dans le thème: Solaris, de Stanislas Lev (roman) et  Andrei Tarkovski. Ce sont pour moi des œuvres majeures, donc n'hésitez pas à aller faire un tour sur le lien vers ce post.

Mais finalement, dimanche après-midi, en période de digestion et de désoeuvrement, cherchant un film dominical (soit très divertissant, pas trop déprimant) sur Netflix à regarder en mode larvage, je suis tombée exactement sur ce dont j'avais besoin: Serenity de Joss Whedon.



Bon, je vous préviens, je vais essayer de ne pas virer complètement en mode geek-fandom-t'es-allée-à-la-dernière-convention?, mais ça risque de déraper par moment. Parce que d'abord, on va parler de SF, et même d'une véritable saga SF, puisqu'il est la suite de la série ultra culte Firefly. Ultra culte pour plusieurs raisons: ça a été plus ou moins dynamitée par la Fox qui l'a annulée après avoir diffusé dans le désordre 11 des 14 épisodes jusqu'alors tournés, dans le genre série maudite, on peut difficilement faire mieux (La caravane de l'étrange peut-être?). Ultra culte aussi, parce que son créateur n'est nul autre que Joss Whedon, Monsieur Buffy contre les vampires et Dollhouse (à mes yeux, une grande série d'anticipation encore injustement charcutée). Ajoutez à cela un vaisseau spacial mythique, Le Serenity, une utopie qui a mal tourné, des aventures galactiques formidables, des anti-héros fauchés, et un super complot intersidéral, tout est là pour créer une légende SF.

Je rappelle brièvement le pitch de la série, et donc du film, qui en est la suite directe. Au XXVIème siècle, l'humanité a abandonné la terre et a colonisé un nouveau système solaire, en terra-formant de nouvelles planètes. Certaines planètes, anciennement colonisées, sont dirigées par L'Alliance et un parlement. D'autres, nouvellement colonisées, sont encore indépendantes. Mais l'Alliance compte bien les soumettre... C'est dans cet univers que circule le Serenity, vaisseau de bric et de broc du capitaine Malcom Reynolds, ancien soldat indépendantiste reconverti dans la contrebande. A son bord, Zoe, le second, ancienne camarade indépendantiste de Malcolm et son époux de pilote, Hoban, la mignonne mécano Kaylee, le mercenaire un peu brutal Jayne et la "compagne" (une sorte de prostituée de haut niveau) Inara. La toute relative tranquillité du bien mal nommé Serenity va être bouleversé lorsque le vaisseau va accueillir d'étranges passagers aux lourds secrets: Simon, un brillant médecin et sa sœur River, qu'il a enlevé à une école de surdoués bien mystérieuse, et l'énigmatique pasteur Derrial Book.



Le film Serenity reprend là où la série Firefly s'était arrêtée et condense en un film tout ce qui était prévu pour une deuxième saison. Donc même s'il est possible de le comprendre sans avoir vu la série, je ne saurai que trop vous conseiller de le faire, d'abord parce que c'est une excellente série et que ça vous permettrait de mieux appréhender l'univers, les personnages et leurs relations entre eux, et d'apprécier le film à sa juste valeur.

Je me dois d'abord de préciser que j'adore Firefly. C'est une série qui évolue dans un genre que je trouve, personnellement, hyper enthousiasmant, puisqu'on est très visiblement entre le western (et oui, ces guerres d'indépendance, ça vous dit rien?) et le space opéra (un peu comme dans le manga Gun Frontier). On convie les grands éléments des deux genres à cet hybride débridé: les gunfights, les héros brigands, la musique country, les grands espaces pour le western, les planètes multiples, les batailles navales interstellaires, et l'exploration galactique pour le space opéra. Il y a tous les éléments que j'aime chez Joss Whedon: des personnages géniaux (et des personnages féminins, notamment, jamais en reste), qu'on a envie de suivre, très bien écrits, un scénario plutôt bien ficelé, un bonne dose d'action et d'humour. Bref, après avoir visionné la série, au bout de 14 petits épisodes, j'étais triste de devoir dire au revoir au Serenity.

J'avais donc un a-priori très positif sur le film Serenity, d'abord parce que je brûlais de retrouver son équipage, mais aussi parce que j'étais terriblement frustrée de ne pas avoir eu le fin mot de l'histoire. Du coup, j'étais bien contente de me le mettre sous la dent. Et je n'ai pas du tout été déçue. Le film Serenity est à la hauteur de la série et de mes attentes, et même au-delà de ce que j'attendais. Il conclut magnifiquement l'histoire et est un beau cadeau pour tous les fans. On reprend tous les ingrédients qui ont fait le succès de la série, en version améliorée: plus de moyens, plus de défis techniques, plus d'action. On peut enfin apprécier à sa juste valeur les talents martiaux de la formidable Summer Glau, (River), qui sont parfaitement mis en valeur par une réalisation très dynamique.


Il est certain que si on le compare à la production cinématographique de science fiction actuel, il est bien évident que Serenity ne fait pas le poids: on est bien loin des budgets explosifs qu'on rencontre dans les block-busters du genre. On est ici sur un petit budget, et un film qui fonctionne surtout sur un scénario béton, beaucoup plus profond (comme toujours avec Whedon) que ne le laisse penser son parti-pris d'Entertainment fun et rigolard. Et quitte à être perdu dans l'espace, j'aimerais bien l'être avec l'équipage du Serenity.








mercredi 20 janvier 2016

Todd Haynes joue les rouges, coeur, Carol



De Todd Haynes, j'avais aimé jusqu'alors tous les films que j'avais vus. Je l'avais découvert avec Safe (et par la même occasion, Julianne Moore). Puis il y avait eu Velvet Goldmine, qui a longtemps été un de mes films de chevet (Ewan Mc Gregor en Iggy Pop, une ode au glam rock et au très très regretté Bowie). Et puis, surtout, il y a eu Loin du Paradis. Celui-là ne pouvait tout simplement pas être un film de chevet, parce qu'il aurait été impossible de se coucher tous les soirs en chialant comme un veau. Tout m'avait bouleversé dans ce film: le triangle amoureux interdit dans les années 50, la toujours merveilleuse Julianne Moore, les 2 trop rares Dennis (Quaid et Haysbert), l'élégance de la réalisation et des costumes et l'émotion, la grande, la vraie du mélodrame qui vient vous cueillir l'air de rien, sans effusions de sang, de torrents de larmes ou d'hurlements de tristesse. La vraie mélancolie, la puissante tristesse, celle qui est digne, celle qu'on retrouve chez Douglas Sirk et dans In the mood for love, le cœur brisé derrière le rouge à lèvres et les volutes de cigarette.

Du coup, quand à Cannes, j'ai vu qu'il présentait une histoire d'amour impossible entre 2 femmes se passant dans les années 50, je savais que je verrai Carol. Et je l'ai vu il y a quelques jours.



On va déjà commencer par ce qui me semble le plus évident et indéniable dans ce film: sa beauté plastique incroyable. Tout est absolument sublime, à commencer par l'image. La lumière d'hiver, blanche et grise, qui domine le film est somptueuse. Elle crée une atmosphère douce et intime qui abrite parfaitement l'histoire d'amour entre ces deux femmes, et les enveloppe dans un brouillard de fumée de cigarette dans lequelle se diffuse au crépuscule les lumières orangées des abat-jour, comme pour dissimuler leur amour tout en douceur aux yeux du monde. Les talents de réalisateurs de Todd Haynes ne sont plus à prouver. La caméra, sans être intrusive, suit avec une belle élégance ces deux personnages. Tout est savamment dosé, pour qu'on se concentre sur les personnages et qu'on épouse sans s'en rendre même compte leur fascination l'une pour l'autre, leurs pensées, par des inserts sur des parties du visage de l'être aimée, la mise en valeur du velouté de la peau, des lumières qui défilent sur une vitre de voiture. Ca a l'air tout simple, c'est virtuose en rien, mais c'est juste, c'est subtil, c'est, comment dire en termes 50's... c'est chic!

Les années 50, parlons-en... J'étais aux anges: le mobilier, les voitures, la nourriture, le maquillage et les costumes, bon sang les costumes. C'est Noël pour tout les fétichistes vintage (dont je suis, je dois bien l'avouer), dans les plus menus détails (l'ouverture dans le dos du col de la robe grise de Carol, je craque).

Et puis il y a deux actrices sublimes, deux très beaux personnages dont on a nous aussi envie de tomber amoureux. Cate Blanchett est formidable dans la peau de cette femme fatale, ce fantasme ambulant qu'est Carol. On comprend tout de suite la fascination qu'elle peut exercer sur Edith Thérèse, avec ses yeux de chatte, la distinction de chacun de ses gestes, son assurance incroyable. Et Cate Blanchett sait parfaitement faire transparaître derrière cet aplomb de façade la passion contenue, le désir réprimé, le doute perpétuel, le désespoir égaré. C'est un vrai personnage romanesque (en même temps, le film est adapté d'un roman de Patricia Highsmith). Mais plus beau encore, à mon avis, est le personnage de Rooney Mara. Parce que quelque part, ce film est quand même un très beau film d'apprentissage et que le personnage d'Edith Thérèse, qui semble être un double d'Hepburn, a un très beau parcours. Celui d'une jeune femme qui arrive à l'âge adulte à une époque où tout devient possible, où l'on peut enfin faire des choix: celui de l'amour, celui de la carrière, celui de l'art. Là où Carol avance à l'aveuglette, suit ses passions, Edith Thérèse prend le temps et décide. Assister à l'épanouissement de ce personnage, c'est une des plus belles expériences que permet le film.



Et au niveau émotion, me direz-vous? Combien ce film vaut-il sur l'échelle de la Madeleine (oui, j'ai décidé d'appeler comme ça mon outil d'évaluation très scientifique de potentiel lacrymal d'un film)?

Et bien, pour vous dire la vérité, j'ai passé une bonne partie du film (au moins jusqu'au 2/3) un peu déçue. Ce que je voyais était très beau, les personnages me plaisaient, leur histoire aussi, ça avait tout pour me toucher, mais non, bizarrement, je ne ressentais pas grand-chose si ce n'est un plaisir de spectatrice séduite. Même pas mal, en somme.



Mais c'était sans compter sans le backlash. J'aurai dû me souvenir que c'était exactement ce que je m'étais dit pendant une bonne partie de In The mood for love: c'est beau, mais c'est un peu artificiel, non? Et ben BIM, même effet qu'avec la scène de l'homme qui parle à des arbres dans le film de Wong Kar Wai. J'ai littéralement fondu en larmes sur la magnifique scène de fin (sérieux, cette scène, c'est le comble du romantisme). Ca c'est toujours le pire. Parce que chialer dans le noir, toute seule, passe encore. Mais continuer à sangloter quand la lumière s'allume, en sortant du cinéma, sur le chemin du retour et une fois assise sur mon canapé, c'est l'effet kiss cool qui pardonne pas. Et j'ai compris pourquoi j'avais craqué comme ça. Parce que oui, tout est joli, tout est bien fait, alors on regarde les jolies choses en oubliant presque que derrière tout ça, il y a une belle histoire, que derrière toutes ces jolies choses, ces gestes délicats, ces paroles policées, il y a des sentiments, des désirs, des émotions, il y a la chose la plus bouleversante qu'on ait filmée, qu'on a toujours filmée et qu'on continuera de filmer tant qu'on aura des caméras: une histoire d'amour tragique. Alors on se laisse bercer par les belles images et de manière subliminale, sans même avoir l'air d'y toucher, ce qu'il y a derrière peut nous atteindre et nous renverser sans qu'on s'y attende. Et en ce qui me concerne je suis complètement tombée dans le panneau. Je me suis laissée ferrée par l'élégance de la mise en scène, la beauté plastique, et j'ai été prise totalement au piège. Et j'espère qu'on m'y reprendra bientôt.


lundi 18 janvier 2016

Les 8 salopards: Tarantino n'est plus là pour rigoler



Je dois bien avouer une chose, les enfants, c'est qu'à la base, je ne voulais pas trop aller voir ce film. Parce Quentin Tarantino, avec sa complainte de Cosette, m'en avait pas mal dissuadée. Très gênée par son "coup de gueule" contre ces méchants de Disney qui font rien qu'à essayer de torpiller la sortie de son film (Oh, Quentin, pauvre petit pot de terre de cinéaste indépendant fauché et inconnu du grand public...) et son attitude pleurnicharde, j'étais bien décidée à lui faire payer le prix de son outrecuidance (parce que c'est quand même un peu comme quand un grand patron se plaint de payer trop d'impôts) par le poids de mon absence dans les salles (d'une manière ou d'une autre, il l'aurait ressentie, j'en suis certaine).

Mais je suis faible, très faible, et il a suffi d'un nom pour que j'aille au cinéma. Ce nom auquel aucun de mes principes ne peut résister, si vous me suivez depuis quelques temps, vous le connaissez: Kurt Russel. J'y peux rien, c'est plus fort que moi, il a beau avoir un peu pris de la bouteille et porter une peau de bête dissimulant ses biscotos, l'éclat rieur de ses yeux et sa moustache encore plus épatante que dans Tombstone ont eu raison de mon ronchonnement. Et grand bien lui en pris.



Parce que, alors que j'avais été plutôt déçue par Django, j'ai enfin pu ici renouer avec Tarantino. Autant je trouvais qu'avec Django, Il tournait en rond sur les hommages au cinéma d'exploitation, au point que son cinéma commençait à devenir une caricature de lui-même, autant je trouvais qu'il en rajoutait des couches inutiles en matière de réalisation et en violence grand-guignolesque, autant ce que j'ai vu avec Les 8 salopards m'ont fait redécouvrir un Tarantino audacieux, qui ne se repose pas sur ses lauriers et ne fait pas forcément ce qu'on attend de lui, et ça, ça m'a fait sacrément plaisir.

Alors que ce soit clair, l'hommage aux films qu'il aime est toujours là, puisque on est clairement face à un genre (le western) qui appelle les références. Là, on n'y échappe pas: entre le format choisi, un sublime ultra panavision 70 mm que certains chanceux ont pu voir projeté dans des conditions idéales (amoureux du celluloid, tu comprends ma jalousie) et une musique composée par sa majesté Ennio Morricone, on est complètement dans les codes du genre, sans compter qu'on peut faire pas mal de parallèles avec de grands classiques, notamment Les 40 tueurs, dont je vous avais parlé il y a peu de temps (sur la période où l'on passe d'un monde de tueurs à un monde politique, et sur le choix des personnages, mais là, je peux pas trop en dire). Mais là où, auparavant, l'utilisation des codes du genre viraient au tics (la pelloche qui craque, les couleurs qui se délavent, les changement de pelloches outranciers...), Tarantino fait preuve d'un qualité dont je ne l'aurais jusqu'alors pas cru capable: la subtilité. Pour la première fois, il troque une mise en scène tape-à-l'oeil pour un classicisme apparent, qui lui permet de développer enfin une mise en scène inventive, cohérente et très belle (alors qu'elle était avant noyée sous des "trucs" de prestidigitateur). Sa manière de filmer l'intérieur et l'extérieur, son utilisation des focales, de composer très minutieusement ses plans, de nous mettre au plus proche des personnages et nous perdre dans une tempête de neige, tout cela est merveilleusement mis en valeur par une certaine pondération à laquelle il ne nous avait pas accoutumés. Pour moi, c'est un film très important de Tarantino, parce que j'ai l'impression qu'il a passé un cap en tant que réalisateur, qu'il a atteint une forme d'âge de raison: il sait où il va, il ne se sent pas obligé d'en faire des tonnes et il vise juste: c'est un vrai bonheur à voir.



Quant à la violence grand-guignolesque, on va pas se mentir, y'a toujours beaucoup de sang. Mais étrangement, alors que précédemment, les explosions de violence chez Tarantino avaient souvent un côté jouissif et assez rigolo, là ça n'est plus du tout le cas, selon moi. Attention, qu'on ne se méprenne pas, je suis la première à kiffer les coups de tatanes même sur Kurtounet dans Boulevard de la mort, et à trouver ça bonnard, mais j'attendais quand même le jour où Tarantino nous montrerait sa face sombre, celui où il enlèverait son maquillage de clown gore pour nous dévoiler ce qu'il y a derrière ce gros nez rouge sang. Ben là, pour moi, c'est fait! Dans les 8 salopards, Tarantino ne rigole plus du tout. On s'entretue, mais ce n'est plus dans la joie et la bonne humeur, ce n'est plus dans un délire visuel plein d'adrénaline. Ici, quand on appuie sur la gâchette, c'est pas pour montrer qu'on est un héros, mais ça prouve bien qu'on est un salaud!

Parce que là, laissez-moi vous dire que rien n'est rose dans ce film. C'est même une réflexion profondément noire et pessimiste sur la justice, qui me semble être le thème principal du film. Tarantino pose (très bien) des questions qui font mal, des questions qui mettent mal à l'aise, notamment dans le contexte actuel: Qu'Est-ce qui justifie la violence? Qu'Est-ce qui fait qu'une nation est civilisée? Quelle est la différence entre justice et vengeance? Entre une personne intègre et un salopard? Un innocent et un coupable? Définitivement, Tarantino est passé là à l'âge adulte, et si ça doit déstabiliser certains fans qui vont beaucoup moins s'amuser, moi cela m'a surprise, et dans le bon sens du terme. Ce qu'on perd en fun, on le gagne en réflexion, en profondeur et à mon avis, on gagne au change.



Après l'écriture du scénario reste toujours assez magique: le côté huis-clos entre ordures à la Dix petits nègres fonctionne très bien, on découvre les personnages par touches, et c'est surtout sur eux que se base le suspens, l'énigme du film: on veut savoir ce qui fait de chacun d'eux un salopard et on peut dire qu'on est pas au bout de nos surprises. D'autant que le casting est un peu un rêve de cinéphile: outre un Kurt d'amour absolument impeccable de rudesse, on a enfin un Samuel L. Jackson qui montre son côté pas cool, une Jennifer Jason Leigh incroyable qu'on est tellement contents de retrouver, ou un Walter Goggins qui joue subtilement un idiot (ce qui n'est pas toujours évident). A part Madsen qui à mon avis, en fait beaucoup trop, aucune erreur. Ca fait même plaisir de voir apparaitre Zoe Bell à un moment.

Après, le film n'est pas exempt de défaut, notamment au niveau de sa longueur. Mais il est comme ça, Tarantino, il aime trop son histoire, ses personnages et ses acteurs, que ça lui fait mal de leur tailler dans le lard. C'est dommage, parce que bon, tout n'est pas franchement utile. Parce que autant ça fait plaisir de voir Zoe Bell dans un personnage plutôt cool, autant ce personnage n'apporte absolument rien à l'intrigue. Autant oui, les dialogues sont toujours bien écrits, autant parfois, ils ne sont pas nécessaires. Je ne dis pas qu'il ne faut pas se faire plaisir de temps en temps (comme avec la petite partie chantée), mais quand on a un film de 187 minutes dont un certains nombres semblent inutiles, même si elles sont agréables, c'est pour moi un peu dommage.



En définitive, ce cru 2016 de Tarantino, je le trouve plus mûr (sauf sur l'utilisation des ciseaux, et les pleurnicheries peut-être, et là, Quentin, il faudrait s'y mettre un des ces 4), plus charpenté, plus âpre aussi. Le goût est un petit peu différent des précédents, on perd peut-être en sucre ce qu'on gagne en acidité, mais je trouve qu'il reste sacrément bien en bouche. Du coup, je suis impatiente de voir ce que nous réserve les prochaines récoltes.






mardi 12 janvier 2016

Il était trois fois en Chine



J'en ai parlé dans mon top 10 2015 brièvement, mais je n'avais pas eu le temps de m'étendre sur le sujet (on peut décemment affirmer que je suis à la bourre sur mes chroniques). Il n'y aura donc aucun suspens sur le sujet: j'ai beaucoup aimé Au delà des montagnes de Jia Zhangke, vu maintenant il y a à peu près une semaine (ce qui est finalement un bon timing pour un verdict définitif, puisqu'on sait à peu près ce qu'on va garder d'un film).

Avant toute chose, je dois avouer que c'est le premier film du réalisateur chinois que je vois, je n'ai donc pas de point de comparaison dans sa filmographie, puisque j'ai raté les très estimés Touch of sin et Still life. Je savais cependant que c'était un metteur en scène qui avait une certaine audace esthétique, et une figure d'enfant rebelle du cinéma chinois. J'ai donc pu vérifier ce constat avec ce film, et ai maintenant très envie de découvrir ses autres films.




Le film commence fin 1999, année de la rétrocession de Macau à la Chine (peu après Hong Kong en 1999) et juste avant l'entrée dans l'an 2000. C'est le début du gros développement économique chinois. Dans une petite ville minière, nous suivons un triangle amoureux: une jeune femme est partagée entre un mineur et le gérant d'une station-service. 2015: un mineur malade doit demander de l'argent à d'ancien amis pour se soigner, une femme divorcée doit faire face à un deuil très éprouvant, en même temps qu'au départ prochain de son fils, qui doit suivre son ex-compagnon à l'étranger. 2025: Un jeune chinois, un peu paumé, habitant depuis longtemps en Australie cherche à retrouver ses racines et ses souvenirs perdus.

Le film est donc composé de 3 parties, retraçant le destin commun de plusieurs personnages et, d'une certaine façon, celui d'un pays. Pour chacune de ces trois parties consécutives, Jia Zhangke a choisi un format différent, une ambiance différente.



La première partie se concentre sur la jeunesse de la belle Tao et de ses prétendants, Zang et Lianzi. Tout commence par une scène de liesse, des jeunes gens dansant ensemble une même chorégraphie sur le titre Go West des Pet Shop Boys. On sent tout l'espoir de cette génération, tout cet élan vers l'extérieur, cette volonté de trouver une vie meilleur à travers le capitalisme, surtout pour Zang, qui s'apprête à acheter toute la ville. Cette première partie est entrecoupée de plans d'archives tournées à l'époque, dont une scène très impressionnante de foule, qui a fait un peu paniquer l'agoraphobe que je suis. Cette partie fait preuve d'une véritable énergie: on y danse, on y fait la fête, on y fait exploser des feux d'artifices et des charges de tnt. Pourtant, on sent que la situation économique n'est pas encore idéale (Tao porte toujours les mêmes vêtements, on rêve d'obtenir un CD et on s'extasie devant une voiture allemande), mais l'optimisme est résolument de la partie. Le format 1:33 choisi pour ce premier volet resserre les personnages dans le plan, ce qui crée une véritable dynamique, un échange entre eux, mais aussi une tension assez constante.



La deuxième partie est plus tragique, elles se concentre sur des problèmes importants d'une vie, les changements radicaux, le deuil et l'éloignement. On passe au format 1.85 et l'image commence à se dépeupler. Les liens communautaires qui semblaient si solides dans la première partie s'étiolent, la mort et la maladie s'invitent dans les vies des personnages, et si la technologie et l'aisance financière a clairement fait son entrée chez certains, on comprend qu'il existe deux Chine très distinctes: celle dont on nous parle si souvent aujourd'hui, cette Chine aisée, friande de consommation et de gadgets technologiques, ouverte vers l'extérieur (mariage mixte avec des occidentaux, études à Shanghai dans des écoles internationales...), mais aussi celle qui ne semble pas avoir bougé, une Chine industrielle rongée par la pollution et la maladie, aux conditions de vie et de travail dignes du XIXè siècle, et ces deux mondes semblent irréconciliables.



Enfin, la dernière partie ouvre totalement le champ en cinémascope, avec une photographie aux couleurs beaucoup plus saturées. Changement de décor, nous nous retrouvons en Australie. Ici, le plan "respire", le ciel bleu, la mer, le soleil, remplace le décor de brique, de cendre et de nuage de la ville minière. Mais dans ce paysage, les personnages semblent bien éloignés les uns des autres, isolés comme si chacun vivait sur sa propre île, et leur solitude est terrible. Cette solitude, est à un moment bouleversé par une scène d'amour très émouvante, où un jeune homme en quête de repères et de ses souvenirs touche brièvement du doigt une partie de son enfance.

En ce qui concerne le scénario du film, il ne faut pas chercher des enjeux narratifs énormes, des sentiments exacerbés, des ruades et des éclats hystériques. Tout est traité de manière très délicate, même la mort, et le rythme du film, assez lent, nous permet de suivre les personnages sans à-coups. Et lorsqu'un évènement vient bouleverser leur vie, on s'est, sans s'en rendre compte, par des scènes assez quotidiennes, complètement attachés à eux. Cependant, rien n'est non plus complaisant et lorsque les personnages souffre, on ne nous épargne rien de sa douleur. La scène où Tao doit venir constater le décès de l'un de ses proches en est un exemple. Elle est assez longue et la caméra, à aucun moment, ne nous laisse de répit. On voudrait quitter le personnage et sa douleur, l'oublier et passer à autre chose, mais on reste avec elle et on est bien obligé d'accepter, comme elle, ce qui vient de se passer.



En ce qui concerne l'interprétation, j'ai lu pas mal de critique assez négatives, notamment sur Zhao Tao, qui interprète Tao. J'avoue ne pas comprendre. En dehors de Zhang Yi, dont je trouve qu'il en fait parfois un peu trop dans la démesure, j'ai trouvé le casting très juste. Pour Zhao Tao, en particulier, c'était une vrai gageure d'interpréter un personnage sur 25 ans, et c'est un défi qu'elle relève avec brio. J'aimerai vraiment voir la première et la dernière scène (qui a causé chez moi un éclat en sanglots irrépressible) l'une à côté de l'autre pour juger du beau travail accompli. Elle est absolument merveilleuse, notamment dans des scènes toute simples, comme la préparation de raviolis, dans lequel elle charge chaque geste d'une belle émotion. L'expression "fait avec amour" prend ici toute sa dimension. J'aime aussi la belle composition de Liang Ji Dong qui interprète Liangzi, un personnage tragique chargé d'une magnifique dignité.



En résumé, j'ai donc beaucoup aimé ce film, qui sans que j'y fasse trop attention, sans volonté d'émouvoir à tout prix, m'a profondément touchée. Soyons clairs, c'est tout sauf un feel-good movie, puisque le constat est très désenchanté, voire même terriblement pessimiste. Je l'ai trouvé véritablement poignant et j'avoue que j'ai mis quelques jours à m'en remettre. Parce que si ni les situations tragiques, ni les sentiments des personnages ne sont over-the-top, la douleur profonde qu'ils portent en eux s'insinuent en nous, pour ne pas nous lâcher. Et si à l'orée du XIXème siècle, on m'avait dit que je serais authentiquement émue par de la dance music des années 90 (de qualité, certes, mais dance music tout de même), j'aurai bien mal misé sur mon futur...

















vendredi 8 janvier 2016

Sur les bons conseils de Tonton Martin: En quatrième vitesse, Quarante tueurs



Comme je vous l'avais annoncé, les fêtes et un peu plus de temps aidant, le Voyage à travers le cinéma américain de Martin Scorcese m'a touchée d'une boulimie cinévore incroyable et j'ai eu envie de voir de nombreux films préconisés dans cette série.
Et il se trouve que par chance, j'ai eu très vite accès à deux d'entre eux que je n'avais pas encore vus (je me suis d'ailleurs rendue compte que j'en avais vu pas mal sur le lot, ce qui m'a fait plaisir parce que dans un sens, c'est toujours ça de moins à pister chez les vendeurs de DVD et médiathèques). Et bien je vous le dit, les conseils de Tonton Martin, c'est pas de la gnognote, parce que pour chacun des films, je me suis régalée, et je m'en suis voulue d'avoir attendu aussi longtemps pour les voir.
Alors c'est reparti, dans la série Oldies but goodies, les deux conseils de Martin Scorcese qui m'ont fait vivre le rêve américain (un peu brisé, c'est toujours plus beau):

En quatrième vitesse, Robert Aldrich



Bon sang, je ne comprend toujours pas pourquoi je n'ai pas vu ce film plus tôt. Tous les ingrédients pour me plaire étaient là. Déjà, j'adore Robert Aldrich et Whatever happened to Baby Jane reste un de mes films préférés au monde, point barre. En plus, un film noir culte avec une pointe de fantastique? Et Mike Hammer sans la moustache? (oui, alors ça, ça ne fonctionne que si vous êtes nés avant 1990) Comment se fait-il que je sois passée à côté?

L'erreur est désormais réparée, j'ai vu En quatrième vitesse, dont je préfère définitivement le titre américain, beaucoup plus sulfureux Kiss me Deadly. Et il était temps. Je comprends pourquoi ce film, si moderne pour l'époque (1955) a tant inspiré une génération entière de réalisateurs, notamment Godard pour A bout de souffle.



D'abord parce que la réalisation, surtout vu le petits moyens de la production, est assez époustouflante. Aldrich sait faire monter le suspens et la pression avec peu de chose, mais on a l'impression que ce qu'il utilise ici, on les reverra de très nombreuses fois par la suite: la menace  signifiée par une paire de chaussures, l'ennemi dont on ne voit pas le visage et qui semble d'autant plus terrifiant, la lumière qui s'échappe d'une boîte mystérieuse, une boîte de Pandore que tous désirent.

Tout semble résolument moderne: les personnages féminins, tous très différents, sont incroyablement sulfureux: la femme-mystère par qui tout arrive, la pythie qui sait tout,  devine tout, et qui joue un drôle de tour à Mike Hammer en montant dans sa voiture, l'amie-amante-associée prête à user de ses charmes et de sa ruse pour les beaux yeux du détective, la fausse idiote vénéneuse... Les dialogues sont à la fois naturalistes et poétiques, entre la gouaille des bas-fonds et l'ode homerienne, un langage à part, une énigme de plus.



Et puis il y a ce scénario bizarre, adapté d'un roman de gare de Mickey Spillane et totalement remodelé pour en faire un oeuvre à part, imprimant sur le film l'atmosphère asphixiante de peur (peur de l'autre, de la trahison, du nucléaire) de la guerre froide, et cette fin, cette fin complètement inattendue qui vaut à elle seul les quelques moments un peu bavards et ennuyeux du film et qui a un sacré Va va voum.

 
Quarante tueurs, Samuel Fuller

Encore un film dont je ne comprend pas pourquoi je ne l'ai pas vu plus tôt. Déjà, c'est un western. Et j'aime beaucoup ce genre. Ensuite, une grande héroïne, La femme au fouet, incarnée par cette splendeur de Barbara Stanwyck, avec un chanson formidable quasi SM que ne renierai pas le Velvet underground de Venus in Furs. Et Samuel Fuller, le réalisateur rebelle, le démonteur de mythe, le créateur d'images incroyables. Dire que sans tonton Martin j'aurai pu passer à côté de ce film encore quelques années...



Parce que là, je vous préviens, je vais crier au chef d'oeuvre, rien de moins: CHEF D'OEUVRE!!!! D'abord parce que le scénario est une vraie merveille à mi-chemin entre grand mythe américain (l'influence de l'histoire de Wyatt Earp et de son règlement de compte à OK Corral est indéniable) et la fin de ce même mythe. Ici, les héros sont fatigués, ils ne trouvent plus leur place dans ce monde qui change de mains et de valeurs. Ce n'est plus le temps de la conquête de l'ouest et la force a laissé la place à la politique. Du coup, le héros, Griff Bonnel , est un as de la gâchette vieillissant qui aimerait bien se ranger des chariots bâchés en se retirant dans une petite ville. Mais un gang régi par une femme au fouet, Jessica, menant d'une poigne de fer pas moins de quarante tueurs règne déjà sur la ville, et le petit frère de Jessica est une vraie teigne. Vous imaginez ce qui va suivre: un duel au sommet entre Griff et Jessica, du sang, du désir, de la poussière, de la vengeance et des larmes.

Et bien sûr, pour qu'un excellent scénario devienne un chef d'œuvre, il faut bien évidemment une belle mise en scène. Et là, laissez moi vous dire qu'il y a du lourd, du début du film à la fin, c'est à la fois classique et audacieux, innovateur (surtout pour l'époque) et dans la lignée du grand western, et c'est beaucoup d'images qui restent en tête. La séquence d'introduction est déjà incroyable. une carriole avance doucement sur un chemin désert. Les nuages au-dessus s'amoncellent. Puis un tonnerre de cavalcade se fait entendre, et apparaissent des pattes de chevaux au galop. En montage alterné, Griff Bonnel et ses compagnons se découvrent un à un dans la carriole et la cavalcade furieuse s'intensifie: on voit apparaître une femme sur un cheval blanc, poursuivie d'une horde sauvage de cavaliers noirs, soulevant un nuage de poussière. L'équipée croise sans ménagement la carriole, dans laquelle Bonnel a bien du mal à maintenir ses chevaux, qui ruent à tout va. Puis le générique défile, alors que la caméra choisi de suivre Barbara Stanwyck triomphante et ses 40 hommes de mains. Tout est déjà là: le défi entre les deux personnages, la violence, la passion. Mais ce n'est pas juste une séquence qui vend du rêve: tout le film est de cet acabit. Pêle-mêle, un plan séquence de malade traversant toute la ville, une femme aimée vu au bout d'un canon de fusil (ouais, James Bond, espèce de copieur!), une scène de tornade incroyable, avec des cascades acrobatiques, et des effets spéciaux hallucinants, un duel à trois sous le soleil... J'ai passé pratiquement tout le film la mâchoire ballante. En plus, la photo est d'un noir et blanc sublimement contrasté, c'est un régal!



Et puis il y a Barbara Stanwyck, la classe incarnée! Elle a là un rôle à sa mesure, un rôle qui tabasse, dans lequel elle peut montrer toute l'étendue de son talent. Elle est à la fois la mère, la maîtresse, la brute, le patron, la sacrifiée, l'égoïste, la belle, la rebelle, l'enfant turbulente et la vieille femme sage et fatiguée, brûlante de désir et froide comme une porte de prison. Elle est tout simplement sublime, au sommet de son art. A 50 balais, elle illumine l'écran avec un sex-appeal de donzelle et une intelligence de jeu qui déborde. Bon sang, c'est un des plus beaux personnages féminins de tout le cinéma américain et il est superbement incarné.




Donc, je le répète, sur ce coup, vraiment merci Tonton Martin: CHEF D'OEUVRE! (ne faites pas comme moi, n'attendez pas de voir ce film, ça urge!)






jeudi 7 janvier 2016

Martin fait du ciné-club



"L'histoire du cinéma est plus grande que les autres, parce qu'elle se projette" Jean-Luc Godard - Histoire(s) du cinéma

Ben ouais, Girlie Cinéphilie, en ce début d'année, a décidé de se la péter grave en citant du JLG. Elle a décidé de se la péter en paillettes grâce au site Cinetrafic qui lui a fait un beau cadeau de Noël pur cinéphilie: le coffret Un voyage à travers les cinéma américains et italien de Martin Scorcese, regroupant 2 DVD, soit presque 8 h d'histoire de ces 2 cinémas par un des plus grands cinéastes actuels, édités par Arte (ici pour leur page Facebook) et sortis le 7octobre 2015. Alors oui, Girlie Cinéphilie est toute d'or vêtue, elle vous fait partager ce moment prestige, et pour se la péter avec vous encore plus, elle vous fera partager quelques conseils en particulier de tonton Martin sur lesquels elle s'est jetée comme Cary Grant sur un champ de maïs et Burt Lancaster sur Deborah Kerr.

Voilà, 2015 aura donc bien été l'année Scorcèse (c'est pas All mad(e) Here qui me contredira): entre l'expo à la cinémathèque, sa présence au Festival Lumière et ce DVD, il aura été de tous les fronts du cinéma. Et j'avoue que ça n'a pas été pour me déplaire. Si l'expo m'a donné envie de revoir certains de ses films en particulier, cette magnifique série en DVD m'a donné envie de revoir de nombreux autres films.



Et c'est là la première, et pas des moindres, qualité de ces films documentaires de Scorcese: il font encore plus aimer le cinéma. Car ce dernier n'a pas décidé de s'ériger en grand professeur, spécialiste du bon goût cinéphilique et des classiques à voir absolument pour ne pas avoir l'air naze en soirée. Non, Martin Scorcese a décidé de partager SON amour du cinéma, ses films préférés à lui, ceux qui l'ont émus, amusés, scotchés, et surtout ceux qui lui ont donné envie d'être le cinéaste qu'il est actuellement. C'est donc une histoire très personnel du cinéma qu'il nous fait partager, nous faisant (re)découvrir des trésors, n'hésitant pas à convoquer aussi bien les grands auteurs que le cinéma de genre. On est ainsi face à une magnifique rétrospective, mais aussi, à travers tous les exemples invoqués, à une très belle réflexion sur le travail de la mise en scène, sans prétention, avec simplicité et un indéniable amour du métier.

Le premier coffret, consacré au cinéma américain est mon préféré des deux. Dans celui-ci, il s'interroge sur les rapports rentabilité-créativité qui font tout le sel d'Hollywood et s'intéresse particulièrement au cinéma de genre, en particulier le western, le film noir et la comédie musicale. L'occasion de revoir des extraits de La prisonnière du désert, de Kiss me Deadly ou de Meet me in St Louis. Il s'interroge également sur les différents rôles du réalisateur: illusionniste, contrebandier ou passeur d'image, et rend hommage à tous les cinéastes qui l'ont fasciné et inspiré, d'Orson Welles à Nicolas Ray en passant par Douglas Sirk. Je dois dire qu'avec ce coffret, je me suis complètement régalée, je n'ai absolument pas vu le temps passer et je me suis fait une belle liste de films à voir et à revoir.



Le second coffret s'intéresse au cinéma italien. Martin Scorcese laisse ici libre cours à ses souvenirs d'enfance, à sa famille sicilienne réunie autour de la télévision à New York pour regarder des films italiens, et montre combien ce cinéma l'a autant forgé que le cinéma hollywoodien en tant que réalisateur. Il invoque De Sica, Fellini ou Antonioni. J'avoue avoir moins été attirée par ce coffret. Pas parce que je n'aime pas le cinéma italien, au contraire, renouer avec Rossellini, par exemple, a été très agréable (je crois que je  n'avais pas vu un film de lui depuis pratiquement 10 ans) et je reste toujours en larmes devant Le voleur de bicyclette. Mais pour moi, cette rétrospective souffrait de 2 défauts: elle ne portait que sur le néo-réalisme et la nouvelle vague italienne, laissant de côté les grandes productions Cinecitta et les films de genre (Bava!!!!!). De plus, la liste de films était beaucoup plus succinte, et ceux-ci étaient longuement analysés. Du coup, plutôt que de me "teaser" et me donner envie d'en voir plus comme ça a été le cas avec le cinéma américain, ce volet m'a plutôt donné l'impression d'avoir vu une version Reader's digest des films en question. Heureusement, j'avais déjà vu bon nombre d'entre eux et je n'ai pas eu beaucoup de spoilers, mais si cela s'adresse à un public qui ne connait pas ces films, j'ai trouvé un peu dommage qu'on en apprenne tout le déroulement narratif. Mais cela m'a tout de même fait très plaisir de pratiquement revoir certains de ces films que je n'avais pas vu depuis longtemps.

Quant aux DVDs en eux-mêmes, rien de bien extravagant: une version VO sans sous-titre ou une version française pour le commentaire et VOST pour les extraits de films, ainsi que la précieuse liste de tous les extraits proposés. Ca aurait peut être mérité un peu plus, mais les 8h de la série sont tellement riches que ça n'était pas vraiment nécessaire. En tous cas, si vous avez oublié un cadeau de Noël, ou que vous ne savez pas comment utiliser l'enveloppe de Mamie cette année, je vous conseille très très fortement ce petit voyage cinématographique, que vous soyez en vacances ou pas. Mais je préfère vous prévenir, il a un effet pervers très dangereux: il donne envie d'enrichir sa DVDthèque très vite, et de manière exponentielle.

Merci encore à Cinétrafic pour les paillettes dans les yeux:
- http://www.cinetrafic.fr/film-bien
- http://www.cinetrafic.fr/film-cool




mardi 5 janvier 2016

Mon palmares 2015

Voilà, 2015 est passé, avec son lot de films plus ou moins appréciés (plutôt plus que moins, j'ai l'impression pour cette année, espérons que ça va continuer...) . Alors avant de commencer l'année 2016, un petit coup d'œil dans le rétro comme Furiosa, et je vous dévoile mon top 10 2015:

10 ex aequo: Miss Hokusai et Duke of Burgundy


Ces deux films n'ont au premier abord pas grand chose en commun. D'un côté j'ai apprécié d'avoir enfin été charmée par un biopic audacieux, prêt à laisser une place à l'imagination et au fantastique. De l'autre, j'ai été absolument séduite par une histoire d'amour lesbienne et sado-maso, pourtant si ordinaire et très espiègle. Les deux films sont cependant de très belles expériences sensorielles et font preuve d'une inventivité et une originalité esthétiques terriblement rafraichissantes. Aucun des deux n'a connu beaucoup de succès en salle, malheureusement, mais j'espère que ces deux films absolument délicieux trouveront leur public en DVD.



9 Mustang
Un très beau film sur une sororité en prise avec l'abrutissement réactionnaire en Turquie, plein d'élan, de vie et d'espoir. Une gifle salvatrice et rebelle et de jeunes actrices sublimes.



8 Au delà des montagnes
Parce que si on m'avait dit un jour que je serais terriblement émue par "Go west" des Pet Shop Boys, je ne l'aurais peut être pas cru, parce que ce film est à la fois doux et terrible et que la réalisation est époustouflante (et ici, le changement de format n'est pas qu'un "truc"). On en parle très bientôt.



7 Shaun le mouton, le film
Un tour de force: un film d'animation plastiquement à tomber, drôle à mourir et pas bavard du tout. Les studios Aardman ont encore frappé.




6 Notre petite sœur
Encore un film sur une sororité. Une très belle œuvre, douce et mélancolique sur la famille, celle qu'on a et celle qu'on se choisit. Beaucoup, beaucoup d'émotion, une réalisation qui sait prendre son temps et de très beaux personnages. Un film auquel je suis restée beaucoup plus attachée que je ne l'aurais pensé en sortie de salle.



5 Les nouveaux héros
La super bonne surprise de l'année. Scotchée par un Disney. J'ai ri, j'ai pas mal pleuré, j'ai adoré l'atmosphère et bon sang, que ce film est intelligent! A voir absolument, avec ou sans enfants, parce que des films pareils, en des temps pareils, on en a tous besoin.



4 Spring
Malheureusement, ce film n'a pas trouvé de distributeur en France. Faut quand même en parler parce que c'est la plus belle histoire d'amour de l'année, que c'est le plus beau film d'horreur de l'année, que les réalisateurs sont les révélations de l'année, qu'il y a la plus belle scène de rencontre amoureuse du siècle. Je rêve qu'un distributeur français se dévoue pour qu'on ait tous accès au DVD.



3 Foxcatcher
La claque du début d'année 2015. Un sommet de réalisation sobre, intelligente et efficace, un trio d'acteurs incroyable, un fait réel qui est une vraie tragédie grecque. Certaines scènes de ce film sont d'une telle ampleur que j'en ai gardé un souvenir impérissable.



2 Mad Max
LE KIFF. Pas besoin d'en rajouter, si vous voulez comprendre, cliquez sur le lien et retournez lire mon billet à la sortie.



1 20000 jours sur terre
Alors, oui, techniquement, il est sorti en 2014, mais comme je ne l'ai vu que début 2015, je le compte parmi les films de 2015. Et qu'il fallait absolument que ce film soit en tête du palmarès. Ce film, un vrai rockumenteur sur Nick Cave est un magnifique hommage à la carrière du chanteur, mais va bien au delà de ça: c'est une des plus belles œuvres traitant du travail de création, c'est une plongée dans l'univers du démiurge, c'est un concentré de poésie. J'ai passé les 3/4 du film à chialer d'émotion, niveau maximum sur l'échelle du syndrome de Stendhal. Une expérience incroyable, de la musique, de la littérature, du son, de l'image, de la beauté à l'état pur. Du cinéma, quoi!